Isaiah avait prit son courage à deux mains et avait décidé de sortir de son hibernation. Mal à l'aise, il était appuyé contre le bar du Pointless Crew tout en sirotant une bièraubeurre fort sucré pour ses papilles habituées qu'au matcha. La musique en fond et les voix des clients fort peu agréables donna le tournis à l'expatrier. Pourtant du bout des lèvres, il se prit à fredonner la mélodie. Lui qui aimait le calme il était servi avec cet endroit. Mais la faute lui revenait qu'à lui même, voilà déjà quelques temps qu'il séjournait en France. Et il n'avait rien fait de concret, juste faire métro-boulot-dodo. Isaiah se prenait à redécouvrir cette seconde culture si différente de celle de son pays d'origine. Certes son père avait essayé de lui inculquer des valeurs à l'opposé de ceux de sa mère. Il se prit par moment à rougir quand on venait l'aborder. Et faisait tous ce qui était à son pouvoir de garder une distance de sécurité envers les personnes au alentour. Mais son regard gris intercepta une chevelure de feu. Lui qui n'avait connu que des crinières foncées, en voir une à l'opposée l'intriguait. Détournant rapidment son regard d'amande pour se reconcentrer sur son verre. Il se prit l'envie de fuir du lieu.

De loin, le spectacle devait être effroyable. Haze était là, parlant et riant fort entouré de quelques gens qui eux-même riaient aux éclats. Il était connu dans le bar, comme dans tous les endroits un minimum ambiancés, pour être une animation à lui tout seul. À vrai dire, personne ne pouvait le rater, entre son attitude et ses cheveux roux. Sans compter sur le fait qu'il se prenait souvent les chaises ou les tables dans la précipitation, donnant l'image d'un homme bien trop saoul. Dire qu'il ne touchait pas à l'alcool...

Et cette fois encore, parti dans un éclat de rire vers le bar afin d'aller se commander un petit O'fraise, il ne remarqua pas cette présence si effacée. Il n'avait absolument pas senti qu'il fonçait droit sur un pauvre type installé au bar. Ses bras puissant en tournèrent alors un corps fin, et une odeur exotique lui vint alors. Passant sur ses lèvres une langue avantureuse, il tâta sans aucune gêne le pauvre homme qui lui tournait le dos.

"Je crois que nous n'avons pas été présenté." Lança finalement Haze en se glissant près de la forme noire qui s'étalait dans son champ de vision. "Je m'appelle Haze. Je suis désolé de vous avoir fait un tel... Rentre dedans." il lui lâchait alors un de ses sourires éclatants.

Alors que Isaiah sirotait sa boisson dans le plus grand des calmes. Il se fit percuté par l'un fameux ivrognes qui peuplaient les soirées. Et celle ci ne faisait pas exception. Le pire fut pour l'asiatique, le manque de sans gêne de l'homme-celui qu'il avait repéré avec ses cheveux de feu- et le brun faillit tourner de l'oeil. Se reprenant et avec un sourire crispé, il essaya de faire sortir le roux de son espace vital. En plus de cela, il avait son haut taché de la boisson ambrée. Certes, le jeune homme avait une patience à toute épreuve mais il ne fallait pas non plus lui courir sur les haricots ! " En effet, mais vous serez t'il possible de me lâcher  ? " demanda courtoisement le franco-japonais qui mourrait d'envie de prendre ses jambes à son cou et de fuir cet endroit infâme.

Mais il se retrouva aveuglé par ce sourire. Il était partagé. Il voulait envoyer ballader le rouquin tripoteur de service mais en même temps il se retrouva fasciné par l'énergumène. On pouvait dire que c'était le pire rentre dedans qu'il n'avait jamais connu ! Ses joues pâles de coloraient de rouges. Est ce à cause de sa gêne ? De son agacement ? Ou de son anxiété  ? Pour l'heure, il evita de regarder les yeux de son vis à vis. Ce n'était pas très polis au Japon de le faire. Mais son père lui avait répété que de ne le faire en France c'était pas bien vu. Il était parfois tiraillée par ce genre de contradiction...

Le lâcher serait compliqué pour Haze. Comment ferait-il connaissance alors ? Il n'était jusque là tombé sur personne de si agacé par le fait d'être touché, ou du moins, peut être que sa réputation l'avait toujours précédé et qu'on l'avait laissé faire plus par compassion qu'autre chose. En tout cas, il s'exécuta sans pour autant s'éloigner de trop, les rires et la musique masquant les bruits ambiants desquels il se servait pour se mouvoir ou pour entendre les mouvements de ses interlocuteurs.

"Est-ce-que je vous offre un verre pour me faire pardonner ?" Au loin ses amis sifflaient et riaient de bon cœur, et Haze leur fit un geste de la main les renvoyant à leurs occupations. "Je suis désolé pour ces idiots. N'y fais pas attention. Et donc, tu veux boire quelque chose ?"

D'un geste et d'un "HEP" sonore assez impoli puisque le barman était près d'eux- enfin il n'en savait rien après tout et le type habitué n'en fit rien-- il appela ce dernier. L'homme toucha la main du jeune avocat pour lui signaler sa présence.

"Super pour moi ce sera un O'fraise, et vous ?" Définitivement, il ne forçait pas le moins du monde.

De l'air, pensa le brun avec soulagement que le roux se soit décalé. Pourtant, celui ci n'était pas prêt à le laisser partir. C'est ébahi face à cette sans gêne que Isaiah regarda l'homme lui proposer un verre dans le plus grand des calmes. " De l'eau " répondit le franco-japonais dans un automatisme sans rien comprendre à cette situation. Lui qui avait essayé de se fondre dans la masse. Le voilà avec un énergumène sur les bras. Quelle drôle de situation... Le pire fut d'entendre les amis de l'homme ricanner. " Pourquoi me parliez vous ? " demanda Isaiah intriguait que le roux lui accorde de l'importance. " Avez vous pariez avec vos amis pour venir me parler ? " Il avait décidé de ne pas contourner le problème  comme aurait fait sa mère et de prendre le taureau par les cornes à la made in France. Oui, beaucoup trop de sentiments de bousculaient en lui et cela le déboussolé. Il remercia du bout des lèvres le serveur qui venait de leur apporter la commande. Détournant son attention de l'homme, il préféra se concentrer sur la musique pop du lieu qui ambiancait la populace. En effet beaucoup de personne se trémoussait sur la piste de danse improvisée.

Les questions de l'autre homme surprirent Haze. Venir lui parler suite à un pari avec ces compagnons de soirée... Il aurait pu, il n'allait pas se mentir. Mais pour cette fois, c'était un pur hasard. Cet homme lui était littéralement tombé dans les bras, et il avait simplement saisi l'opportunité. Il était comme ça, notre petit rouquin, à saisir toutes les opportunités qui s'offraient à lui. Bien souvent, cela tournait à la catastrophe, mais parfois, il pouvait y avoir de magnifiques surprises. Il remercia à son tour le serveur puis il s'affala sur le bar, remuant sa boisson écarlate avec un sourire en coin, séducteur.

"En effet, cela aurait pu être possible." Répondit Haze en tout honnêteté. "Mais pour cette fois, je voulais juste venir chercher un verre, et vous êtes apparu dans mes bras." Une expression amusée éclairait son visage parsemé de petite tâches de rousseur. "Appelons ça le destin !"

Il lui fit un clin d'oeil puis il se releva et porta la paille à ses lèvres. Le geste avait été légèrement hésitant entre le moment où il attrapa sa paille et celui où il tâtonna pour la mettre à la bouche. Une seconde, il se concentra sur le sang qui lui coulait sur la langue, puis le long de la gorge. Ce goût subtil de fraise cassant le goût franc du fer lui ravissait toujours autant les papilles. Après deux gorgées, il revint vers son nouvel ami. Comme il aurait aimé que l'odeur de la sueur, du café et des boissons alcoolisées ne couvrent pas celle très exotique qu'il avait senti lorsqu'il lui était rentré dedans. Comme il aurait aimé que les rires et la musique, rythmés par le bruit régulier du percolateur, ne gâche pas les tonalités étrangères de la voix de cet homme.

"Et donc, tu ne viens pas souvent ici. Est-ce que tu fuis la foule ou est-ce que tu viens d'arriver dans le coin ?" Demanda-t-il en essuyant du pouce une perle de sang au coin de ses lèvres avant d'y passer la langue.

La franchise de l'homme le déstabilisa. Il lui semblait que le roux soit le stéréotype même du bon vivant riant aux pires blagues. Lui qui était de nature calme, son compagnon fe comptoir arrivait facilement à le mettre à fleur de peau. Et c'est agacé par le tutoiement de celle-ci que Isaiah se crispa sur place. Ils n'avaient pas élevé les mandragores ensembles  ! Pensa l'expatrier en jouant avec son verre. " Non en effet, je ne viens pas ici. " répondit froidement le brun qui aurait pu glacer un glaçon. Qui sait, peut être cela aller décourager l'impertinent  ? Même comme on disait la mauvaise herbe revenait toujours. " On peut dire ça, comme ça " souffla le demi-sorcier en regardant du coin de l'oeil la foule.

Tout cela le dépasser. Et il voulait être seul, boire son verre sans avoir l'enquiquineur de première collé à lui. Il espérait refroidir les ardeurs du rouquin. " Vous devriez peut être rejoindre vos amis. Je pense que leur compagnie vous est plus agréable que la mienne" dit Isaiah en montrant le groupe fêtard avec un certain dédain. Il aurait peut être dû rester chez lui, à boire un thé et à lire un livre. C'est par des stratagèmes ingénieux, qu'il réussit à garder une certaine distance de sécurité entre les deux.  L'homme arrivait sans problème à le bouleversait et il ne voulait pas se laisser attraper aussi facilement par ce charme.

C'est avec maladresse qu'il fit renverser son verre sur les habits de l'homme. Rougissant de gêne et de colère-envers lui même- Isaiah attrapa une serviette pour vite réparer ses bêtises. " Oh, excusez ma maladresse " dit le brun rapidement dont la gêne venait d'atteindre son sommet. " Dite moi ce que je peux faire pour réparer ça" Si il s'écoutait il se mettrait à genoux comme un bon japonais pour demander son pardon. Ce qu'il avait honte ! Il attrapa sa baguette et jetta un sort de propreté sur son voisin.

Contrairement à l'effet escompté, Haze fut d'autant plus intéressé par ce type dont il ne devinait rien, hormis qu'il était totalement refroidi par sa présence. L'air d'un chaton à l'intérêt titillé, le rouquin but encore un peu de sa boisson rouge mais alors qu'il allait lui répondre, ce fut un verre d'eau qui finit sur son torse. Là, l'autre homme se jeta presque sur lui dans l'optique de "réparer ça", ce qui fit éclater de rire le bon vivant. Alors comme ça cet homme était excessif dans tout ce qu'il faisait ? Une odeur exotique, une silhouette svelte, un comportement excessivement distant et excessivement coupable... Claquant des doigts d'un air théâtral alors que l'homme utilisa la magie pour le sécher, il s’exclama.

"Je sais ! Tu dois être japonais !" Il était incollable pour ce genre d'exercice. Puis il rebondit sur une nouvelle opportunité. "Je ne pourrai te pardonner que si tu acceptes de me revoir une autre fois... autrement tu vivras pour toujours avec la culpabilité de m'avoir... souillé." Il lui prit les mains et les toucha doucement, brièvement. Sa peau était douce et fine, lisse. Il ne devait pas être beaucoup plus vieux que lui, en tout cas il savait à sa voix qu'il n'était pas beaucoup plus jeune.

Il attrapa une serviette, puis un stylo qui traînait sur le comptoir, et il écrivit son numéro de téléphone. Evidemment à avoir traîné la majorité de sa vie avec des humains, il avait des reflexes d'humains et du matériel humain. Là il écrivit son prénom et son nom. Il termina avec un [Appelle moi ! ;) ] puis il glissa le papier en direction de l'autre homme.

Oui, définitivement, Isaiah était totalement estomaqué par le comportement libertin de l'homme. Pourtant, il devait avouer que cela n'allait pas forcément le déplaire dans un certain sens. Les joues rouges, il se maudissait d'avoir fait preuve de maladresse et faillit se flageller sur place d'avoir commis une erreur pareille dans un lieu bondé. "Euh oui ? " dit le dit japonais alors quand vérité il n'était qu'un sorte d'hybride. On l'avait souvent confondu avec un Coréen. Et il fut étonné que l'homme soit aussi perspicace. "Ne vous inquiétez pas je prendrais mes dispositions " répondit Isaiah qui ne voulait pas se laisser démonter aussi facilement Relevant la tête fièrement, il planta son regard anthracite dans celui clair du roux.

Mais il eut un mouvement de recul, l'homme l'avait prit au dépourvu avec ce toucher. Il réussit avec ses maigres forces à se dégager des mains viriles du bel homme pour reprendre la dite distance de sécurité. Il vit celui-ci attrapa un morceau de serviette pour écrire, un numéro. Ne sachant que faire avec ce papier tendu, il le mit au fond de sa poche. Il était vrai que ce papier était voué à errer dans le néant des peluches et d'autres objets non-identifiables de son manteau. Il crut comprendre avec les manies moldu du rouquin, que cela devait être une technique de l'autre monde. Jetant un coup d'oeil à sa montre, il vit l'heure tardive et décida de prendre la fuite à la anglaise. Avec un sourire maladroit, il souhaita une bonne soirée à son voisin. Et sans un regard en arrière il s'évapora dans la nuit.

Là, enfin, il le sentit. Cette sensation, ce picotement que l'on ressent entre les omoplates lorsque le regard de quelqu'un est rivé sur soi. Enfin, il le regardait. Fier de lui, il bomba le torse. Voilà une petite victoire du soir qui venait d'illuminer cette journée assez morne remplie de papiers et de signatures. Il s'en retourna à son verre, bu de nouveau deux gorgées puis il se tourna de nouveau vers l'homme. Là, il vit vaguement la tâche noire bouger.

"J'attendrai ton appel ! Ou de te recroiser." Dit-il alors en riant de plus belle. Mais à ce moment là, une main s'abattit sur son épaule.

"Eh mec, l'autre type est parti, t'es tout seul." S’esclaffa un de ses potes venu le rejoindre en le voyant seul. "Continue pas de parler, t'as l'air con !"

"Oh merde !" Répondit alors Haze en se tournant, se marrant de nouveau de la situation. "Pas grave, je le retrouverai !"

Et ce n'était pas une parole en l'air. C'était un vampire, il était né pour traquer les êtres vivants, et sa cécité renforçait d'autant plus tous ses autres sens. Bon, s'il avait été une fée cela aurait été plus facile de le capter, mais ça n'allait pas être compliqué pour autant. Là, il mit une main dans les reins de son complice et il se leva après avoir terminé son verre d'une traite. Il n'oublierait pas de ci-tôt cette odeur exotique.